dimanche 7 septembre 2014

Portrait de deux marionnettistes

Charles Muller, 1850-1917


Le Nord Illustré, janvier 1913
Collection personnelle

"Son théâtre est, sans doute, un des plus importants de Lille avec un jeu de 140 marionnettes, nombre assez exceptionnel. Lui aussi a fait appel à Léonard Verbraeckel pour le travail de sculpture. Muller possède l'assortiment classique de décors : le palais, la place publique, la prison, la chaumière, la vieille forteresse, la grotte, la forêt. […] Charles Muller meurt en 1917. On retrouvera, près d'Arras, bien après la seconde guerre mondiale, le matériel d'un théâtre ayant appartenu à un certain Croquefer. Les marionnettes de ce Croquefer sont, à l'en pas douter, celles qu'André Fage avait photographiées chez Muller… depuis lors, ce matériel a encore disparu !"

extrait de : Marionnettes traditionnelles en Flandre Française de langue picarde, par Andrée Leroux et Alain Guillemin, 1ère édition, Dunkerque, 1984

Charles Muller


Camille Charles Muller est né à Lille le 4 décembre 1850, au 20 de la rue Saint Genois. son père Firmin Charles, tailleur, est âgé de 61 ans à sa naissance, il décède en 1856. Sa mère, Anne Jeanne Courtecuisse, est née en 1803. Tous les deux sont originaires de Lille. Charles, qui exerce la profession de cartonnier, se marie en 1871 avec Louise Palmyre Destombes, ouvrière de filature, née à Lille en 1852, fille d'Alexandre Auguste, journalier, et Flore Lepers. Lors de son mariage il est domicilié 40 rue du Bourdeau, il y reste jusqu'en 1888. Ensuite il ouvre une salle dans sa cave au 15 de la rue Mahieu, c'est celle que l'on voit dans l'article de 1913.

Les garçons d'un côté, les filles de l'autre
comme à l'école


L'article d'André Farge, Les marionnettes s'en vont, publié dans Le Nord Illustré en 1913 est ici

Une conférence d'Alain Guillemin du 20 janvier 2011 : Un regard nouveau sur l'histoire du théâtre et de la marionnette

Le site du Théâtre Louis Richard où l'on peut télécharger la thèse de doctorat d'Alain Guillemin Jeux chamaniques, jeux marionnettiques : aux sources d'une culture théâtrale.



--------***--------



Louis François Pladys, 1804-1884

Autre exemple de marionnettiste. Un Dunkerquois au parcours intéressant.
Louis Pladys est né le 6 décembre 1804 à Dunkerque, son père, Louis, est né à Bruges en 1775, il a été tour à tour imprimeur, épicier, fabriquant de tabac, il épouse en seconde noce Catherine Julie Marie Marchand qui lui donnera son seul fils. On sait peu de chose sur ses débuts d'artiste, mais dès 1840 à Boulogne sur Mer, sur l'acte de décès de sa première épouse, Louise Marchand, il est mentionné comme artiste dramatique. En 1842, à Arles, il est marchand tailleur, il épouse Rose Michel, fille d'un tonnelier de la ville, qui lui donnera quatre enfants. Il change de profession et redevient artiste dramatique et lyrique, d'abord à Toulouse (1844) puis à Aix en Provence (1845) et à Nîmes (1847). En 1849 à Carpentras, où est né son second fils Auguste Claude, il est toujours comédien. Le Dictionnaire des comédiens nous donne quelques villes où il s'est produit ensuite : Angers (1862), Calais (1867, Paris (1868) et retour à Dunkerque en 1869. C'est à cette époque qu'il fait faire son portrait par le photographe dunkerquois Ary-Jouanne, il en fait parvenir un exemplaire à une ancienne partenaire avec cette dédicace "à ma bonne Zulma Bouffard, souvenir d'amitiés de son vieil ami Louis Pladys âgé de 65 ans". Par miracle la comédienne a conservé cette photo qui a été exhumée récemment sur un site d'enchère. Zulma n'est pas une inconnue, elle fut la maîtresse de Jacques Offenbach qui lui a écrit de nombreux rôles dans ses opérettes, comme celui de Gabrielle, la gantière, dans La Vie Parisienne.

Louis Pladys en 1869
Collection personnelle

En 1871 sa situation est précaire, un artiste du théâtre de Dunkerque, Kreitz, donne un concert au bénéfice de l'ancien trial de l'opéra-comique. En 1883 il touche sa pension de comédien, 200 fr par an, mais pour vivre il a ouvert un théâtre de marionnettes sur la plage. Il obtient des subventions de la ville (200 fr, en 1878, 1879 et 1880). Ce théâtre ne fonctionne que durant la saison des bains de mer. Un article du Nord Maritime de 1882 nous le décrit "Le petit théâtre de Pladys. […] Il compose ses pièces lui même, les met à la scène et les interprète lui même, pratiquement parlant. Quand je dis pratiquement je suis pourtant dans l'erreur car notre guignol a abandonné le vieux système de la pratique et l'a remplacé par le mirliton ''c'est moins vibrant, dit-il, et ça s'avale moins''. Outre qu'il est auteur et impresario, il est encore sculpteur et costumier, c'est lui qui a fabriqué, modelé, en un mot fait ses artistes à coup de couteau et qui les a habillés à coups d'aiguilles". Il décède le 17 septembre 1884.
Son petit fils, Julien Louis Charles, fils naturel de Rose Jeanne Louise, né en 1871, prend sa succession, il obtient également quelques subventions de la ville (100 fr en 1887, 1888, 1889). Le Nord Maritime annonce les titres des pièces : La Présentation, Pinchette, le Chevalier gascon, les Anglais en voyage, le Capitaine Guignol, le Village enchanté, le Maître d'école, Monsieur l'intendant, l'Avare punie, la Marquise d'Alpaga. La dernière saison semble être celle de 1891. En 1902 on retrouve Julien Pladys à Roubaix où il demande au commissaire de police l'autorisation d'installer un théâtre de pantins sous la grand porte de son habitation au 12 rue Cugnot. Un avis favorable lui est donné.

Christian Declerck




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire